La transmission « naturelle » des savoirs - Equipe Data, Intelligence and Graphs Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2020

La transmission « naturelle » des savoirs

Jean-Louis Dessalles

Résumé

Les sociétés de chasseurs-cueilleurs n’ont pas d’écoles. Elles accumulent pourtant des savoirs, elles possèdent des langues et des cultures sophistiquées. Si l’on compare notre espèce aux autres primates, tout est différent. Les cultures animales existent, mais elles sont si restreintes qu’elles sont longtemps passées inaperçues aux yeux des éthologues. Pourquoi existe-t-il tant de « savoirs » dans notre espèce ? Et pourquoi les transmettons-nous ? Si la question semble saugrenue, c’est parce que nous avons perdu de vue le caractère apparemment contre-nature de ce comportement.
Les sociétés de chasseurs-cueilleurs n'ont pas d'écoles. Elles accumulent pourtant des savoirs, elles possèdent des langues et des cultures sophistiquées. Si l'on compare notre espèce aux autres primates, tout est différent. Les cultures animales existent, mais elles sont si restreintes qu'elles sont longtemps passées inaperçues aux yeux des éthologues. Pourquoi existe-t-il tant de « savoirs » dans notre espèce ? Et pourquoi les transmettons-nous ? Si la question semble saugrenue, c'est parce que nous avons perdu de vue le caractère apparemment contre-nature de ce comportement. Un comportement contre-nature Les chimpanzés étudiés par l'éthologue Tetsuro Matsuzawa [1994] dans la forêt de Bossou, en Guinée, cassent spontanément des noix très dures en posant la noix sur une pierre (l'enclume) et en frappant avec une autre pierre (le marteau). Leur expertise demande des années d'imitation des congénères. Les jeunes l'acquièrent en explorant un peu au hasard des centaines de combinaisons de paramètres : choix des pierres, position de l'enclume, face et angle de frappe, etc. Les adultes sont très bienveillants vis-à-vis des jeunes qui les observent, mais on ne les voit jamais leur montrer activement le bon geste et encore moins intervenir lorsqu'ils font des erreurs à répétition. L'espèce humaine offre un contraste saisissant. Prenons l'exemple des forums techniques. Imaginons un étudiant qui apprend le langage informatique Python et cherche à savoir comment inverser une liste. Il tape « python reverse list » sur son moteur de recherche et arrive sur un forum comme Stackoverflow. Il constate que sa question a déjà été posée par un autre débutant et qu'elle a obtenu 29 réponses qui ont elles-mêmes reçu 34 commentaires. Les personnes qui ont pris la peine de répondre ne connaissent pas l'étudiant. Elles font partie d'une communauté, celle des programmeurs Python, au sein de laquelle l'entraide spontanée est considérée comme normale. Paru dans : P. Pion & N. Schlanger (Eds.), Apprendre-Archéologie de la transmission des savoirs, pp. 49-58. Paris: La Découverte, 2020.
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hal-02867145 , version 1 (13-06-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02867145 , version 1

Citer

Jean-Louis Dessalles. La transmission « naturelle » des savoirs. Patrick Pion; Nathan Schlanger. Apprendre - Archéologie de la transmission des savoirs, La Découverte, pp.49-58, 2020, 9782348055522. ⟨hal-02867145⟩
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